Muséedes
Beaux-Arts de Dijon
Attention
:
cette page contient de nombreuses images un peu longues à
charger. Patience ...
Philippe
le Hardi est un grand mécène qui vide les caisses
ducales.
Philippe dote les églises
et les établissements conventuels de son duché d’œuvres
d’art comme ce retable de la Crucifixion qui est commandé
en même temps que le retable des Saints et des Martyrs, en
1390, à deux artistes flamands : le sculpteur Jacques de
Baerze et le peintre et doreur Melchior Broederlam.
Les retables sont exécutés
à partir de 1393 et arrivent à Dijon en 1399. Le travail
est donc très long.
Ce retable est installé
sur l’autel de la chapelle du duc de Berry, frère de Philippe
le Hardi, dans la Chartreuse de Champmol. Le retable des martyrs
est installé sur l’autel de la chapelle de la Chartreuse.
Le coffrage est en chêne
; le tilleul est utilisé pour le décor architectural
et les statuettes.
Le registre supérieur de la partie centrale
et des deux volets rappelle les décors d’églises avec
les baies, les vitraux, les pinacles. Les anges sont des rajouts
du XIXème siècle car les originaux ont disparu.
Le registre inférieur
des deux volets représente des statuettes
de saints et de saintes de la Bible représentés avec
leurs attributs :
Volet
droit : (on
ne le voit pas sur la photo ci-dessus)
- Saint Jean Baptiste
ou Saint Jos de Ponthieux, saint très célébré
dans les pays du nord ;
- Sainte Barbe ;
- Saint Louis ;
- Sainte Marguerite,
très célébrée en Bourgogne ;
- Saint Antoine, saint
de Philippe le Hardi, né le jour de la saint Antoine et très
vénéré par ailleurs. Il est debout sur des
flammes, accompagné d'un porc (Légende Dorée
: saint Antoine pouvait soigner le mal des ardents, intoxication
due à la consommation de farines de seigle ou d'autres céréales
contaminées par l'ergot, champignon parasite des ovaires
de seigle. Le feu de Saint-Antoine se manifeste par
des troubles digestifs, puis par des accidents convulsifs ou gangreneux.
L’ordre des Antonites, celui de Colmar en particulier, soignait
ce mal avec de la couenne de porc).
Volet
gauche : (on
ne le voit pas sur la photo ci-dessus)
- Saint Georges, représenté
comme un chevalier contemporain, terrasse le dragon (bottes d’armures
en poulaine, ses genouillères, son juste au corps, sa cotte
de maille, son casque à visière) ;
- Marie Madeleine avec
le pot d’onguent se rend au tombeau ;
- Saint Jean l’Evangéliste
avec un calice d’où sortent un serpent et un dragon (Légende
Dorée : Jean se trouve à Ephèse ; il est condamné
par le gouverneur romain de cette ville à boire un breuvage
constitué de petits serpents très venimeux) ;
- Sainte Catherine d’Alexandrie
tient la roue de son martyre sur laquelle elle devait être
déchiquetée et que Dieu foudroie, ainsi que l’épée
de sa décollation. Elle piétine l’empereur romain
Maximien qui l’avait convoitée puis condamné à
mort ;
- Saint Christophe qui
porte l'Enfant Jésus sur ses épaules. Enfant qui fait
le geste de bénédiction et qui tient le globe terrestre.
Panneau
central : très fouillé.
Micro-architecture. Dentelle de tilleul.
- Registre
supérieur :
statues d’apôtres, d’anges musiciens et d’anges
portant les instruments de la Passion. Entre les vitraux, des gargouilles.
- Registre
inférieur : des scènes de
la vie du Christ.
L’adoration
des Mages : pas
de mage noir. Melchior apparaît seulement au XVIème
siècle avec la peau noire. Le noir était au Moyen-Age
la couleur des infidèles, des sarrasins, du Diable. L’attitude
de l’enfant Jésus est due à une dévotion septentrionale,
la Devotio moderna, qui conseille aux artistes de représenter
Jésus comme un enfant normal, comme les autres, avec des
gestes d’amusement. Ici, Jésus reçoit de l’or des
mains de Balthazar. Pour le remercier, il lui tire la moustache.
Balthazar rejette sa tête en arrière. Le mage derrière
lui, étonné par cette scène, se gratte la tête
en relevant sa couronne. Par la suite, on verra Jésus jouant
avec un oiseau, tenant une pomme, avec des attitudes différentes.
Joseph est assis par terre et tient la cuiller et l’écuelle
pour nous signifier qu’il est le père nourricier et non pas
le père géniteur du Christ. Le bœuf et l’âne
sont représentés assez naïvement.
-
La scène centrale représente
la Crucifixion.
Le Christ et la croix sont modernes puisque les originaux sont emmenés
en 1933 par le restaurateur de Chicago. Le bon larron est surmonté
d’un ange qui emmène son âme, symbolisée par
un nourrisson, au paradis, symbolisé lui par le soleil. Le
mauvais larron est surmonté d’un démon griffu, cornu
et grimaçant qui emporte son âme, qui se débat,
en enfer. Celui-ci est symbolisé par la pleine lune. Ce coté
négatif se trouve à gauche du Christ, la sinistra,
le côté maléfique.
Différents personnages : le porte-échelle
qui va servir lors de la Déploration du Christ ; le porte-éponge
qui l’abreuve de fiel ; le porte-lance qui va lui percer le côté.
Le sculpteur utilise un raccourci pour figurer les chevaux qui grimpent
sur le mont Golgotha : les chevaux se cabrent. Au premier plan,
les soldats jouent la tunique du Christ aux dés. L’un d’eux
souffle sur ses dés pour se porter chance. Remarquer les
trognes.
Le groupe des saintes
femmes : Marie, en pamoison et Marie-Madeleine qui lève les
bras au ciel en signe de détresse.
La
mise au tombeau : Nicomède, Joseph d’Arimatie
et le tombeau qui reprend la décoration architecturale supérieure.
L’état de conservation est remarquable.
Le retable
a été redoré mais il nous est parvenu dans
cet état. Il ne faut pas oublié qu’il était
très souvent fermé (verrou, ferrures) et seulement
ouvert les jours de fêtes religieuses importantes (fête
de la Vierge, Pâques, Noël : sept à huit fois
par an).