Le
festival de l'aventure de Dijon / + palmarès 2001 : GO
Dijon,
envoyé spécial
Pas
de tapis rouge, peu de caméras, mais de vraies vedettes!
Les célébrités de l'Aventure se sont déplacées
en nombre pour le festival «Ecrans de l'Aventure»: Claudie
André-Deshays, cosmonaute, Philippe Monnet, recordman du
tour du monde à la voile en solitaire (en se dirigeant vers
l'est, contre les vents dominants!) et vainqueur en copilote du
Paris-Dakar, ou encore Thor Heyerdal, héro de l'odyssée
du Kon-Tiki. Mais les grandes stars du festival auront bien été
les oies naines de «Voisins des Nuages», de Franck Cuvelier.
Ce film de 52 minutes retrace les efforts du Français Christian
Mouellec et du Suédois Lambart von Essen pour sauver cette
espèce d'oies sauvages menacée d'extinction. Des oies
ont été élevées en captivité
puis ont été accompagnées en ULM sur plusieurs
centaines de kilomètres pour leur apprendre une route migratoire
plus sûre. Ce long vol a donné lieu à des images
aériennes extraordinaires. Le palmarès fut d'ailleurs
assez aérien puisque le prix spécial du Jury est revenu
à «From Nowhere to the Middle of Nowhere», récit
de la première traversée en parapente biplace, sans
assistance, de la partie ouest du Népal, effectuée
par les parapentistes John Silvester et Alun Hugues.
Retombées
médiatiques. Les réalisateurs de ces films peuvent
espérer une diffusion à la télévision,
ce qui leur permettrait de rembourser leurs dettes et de préparer
leur prochaine expédition. Car une bonne part des aventuriers
présents ne vivent que des retombées médiatiques
de leurs exploits. Les films sont une source importante de revenu,
bien plus que les livres: «la diffusion de mon précédent
film(1) de 26 minutes m'a rapporté autant que les ventes
du livre en deux ans et demi» , rapporte Sylvain Tesson. Arnaud
Tortel, qui a traversé avec son coéquipier Rodolphe
André l'océan de glace du pôle nord à
ski annonce qu'il a un contact avancé avec TF1, un privilège
rare. Certains sont cependant déjà consacrés
par les médias. Le très demandé Philippe Monnet
a été récompensé samedi à Dijon
du titre d'aventurier de l'année. Pour lui, les débouchés
sont assurés. «Mais je suis revenu de mon tour du monde
criblé de dettes» fait- il remarquer. Mais de tout
cela on ne parle finalement que très peu. Le Festival de
Dijon, c'est dix-huit films en compétition, deux expositions,
mais surtout une soixantaine d'aventuriers, venus défendre
leur film ou tout simplement pour voir et se rencontrer. On peut
y observer Arnaud Tourtel, qui a traversé le pôle nord
à ski discuter avec Sylvain Tesson, qui revient d'une odyssée
à cheval en Asie Centrale; Victoria Murden, première
femme a avoir vaincu l'Atlantique à la rame s'entretenir
avec Claudie André-Deshays. Connus du grand public pour certains,
complètement anonymes pour la plupart.
Chasseur
de trésor.On croise aussi parfois des personalités
marginales. Philippe Kosta est de celles-là: «à
la limite du présentable», même, selon Hubert
de Chevigny, l'un des organisateurs. Philippe Kosta est un chercheur
de trésor. Un film, «Tresoro, portrait d'un aventurier»,
lui est consacré. L'énergumène raconte qu'il
a quitté la France à 17 ans pour aller travailler
dans une mine d'or au Yukon (grand nord canadien). Pilleur d'épaves,
condamné en correctionelle en France pour cela, il se consacre
désormais à la recherche du trésor des Incas
en Equateur. Il s'y promène armé, en santiags, le
mégot aux lèvres. Bref, un vrai, un dur, un pas complaisant.
Une femme de l'assistance lui demande: « si votre petite fille
vous demande de raccrocher, de rester à la maison»?
La réponse fuse: «il ne faut pas confondre sensiblitité
et sensiblerie. Je ne répondrai pas à cette question».
Il ne s'attarde pas longtemps aux interviews, il préfère
siroter sa «limonade» au bar. Finalement, c'est autour
d'un petit Bourgogne que tout ce monde si différend mais
finalement si semblable dans ses aspirations se retrouve pour évoquer
des souvenirs. Gérard Janichon pionnier de la navigation
dans les mers du sud, résume tout: «pendant cinq ans
de voyage, tous les matins je me suis réveillé en
me disant: quand même on a du bol, c'est génial...»
«Nous
représentons plus le milieu de l'aventure que le milieu du
cinéma»
Par
ETIENNE GERNELLE
--------------------------------------------------------------------------------
Hubert de Chevigny, président de la Guilde Européenne
du Raid, qui organise l'événement.
A
quoi sert ce festival?
C'est un rendez-vous annuel du film d'aventure, mais c'est surtout
un rendez vous d'hommes et de femmes puisque les films sont soutenus
par leurs auteurs.
Est-ce
aussi un marché du film d'aventure?
Vous touchez un point sensible. Il y a la rencontre avec les professionels
de la production, de la réalisation. Le problème des
aventuriers, c'est qu'ils n'ont pas accès aux réseaux
de diffusion. Il est évident que les premiers prix, les films
primés ont quasiment la garantie d'une diffusion à
la télévision. Mais même si les diffuseurs sont
plus nombreux aujourd'hui avec les chaines thématiques, on
ne vient pas encore ici pour «magasiner».
Qu'est-ce
qu'un bon film d'aventure?
On représente plutôt le milieu de l'aventure que le
milieu du cinéma. Notre regard est avant tout un regard d'aventurier.
Si l'aventure est bidouillée, pas authentique, ca ne passe
pas. Les moyens mis en oeuvre pour le tournage ne sont pas déterminants.
J'en veux pour preuve le film de Poussin et Tesson il y a deux ans
(NDLR: Marcheurs dans le ciel, à propos d'une marche de 5000
km dans l'Himmalaya) qui a été filmé avec un
petit camescope, une seule pile et seulement six heures de rush
en tout: ils ont eu la Toison d'or!
liberation.fr
|